Cette votation soulève en effet une question de légitimité, d’autorité et de pouvoir qui peut être formulée ainsi : en vertu de quelles valeurs le peuple suisse prétend-il contrôler de l’extérieur l’élaboration d’une forme occidentale de l’Islam ? Des valeurs chrétiennes ? Des conceptions laïques fondées sur le rejet des valeurs spirituelles au motif que ces dernières n’accordent pas aux puissances temporelles leur pleine émancipation ? Les impératifs d’une mondialisation réduisant toutes valeurs à la quantité, telle une préfiguration organisée de l’anarchie : la tyrannie ? Des circonstances et faits d’actualité devraient encourager le lecteur à se focaliser sur la troisième proposition - des faits gérés au moyen des algorithmes, soit dit en passant... On le comprend : au-delà de son résultat immédiat, cette votation attire l’attention des Suisses sur l’importance d’une résistance spirituelle (la seule qui soit toujours possible) aux impératifs de la mondialisation; assurément, il peut sembler pénible de remettre fondamentalement en question son mode de vie alors que l’on se trouve très démuni spirituellement et culturellement pour entreprendre cette démarche pressante. Mais si l’on est bien orienté, cela se révèle en fait bien plus facile qu’on pourrait se l’imaginer (en ne perdant pas de vue qu’entreprendre une résistance spirituelle ne s’improvise pas, de même qu’il n’y a pas de « bricolage » possible en matière de réalisation spirituelle). Dans cette perspective, une question déterminante vient tout naturellement à l’esprit : quelle est la Voie de réalisation spirituelle parfaitement (vraiment et réellement) adaptée à cette époque de décadence spirituelle mondialisée ? La réponse devrait s’imposer à tout homme sincère (un homme ordinaire, tout rempli de passion, incapable de pratique spirituelle, incapable donc de se fonder sur ses propres actes, paroles et pensées pour se libérer du cycle fondamentalement douloureux des naissances et des morts) : la Voie réellement adaptée à cette époque spirituellement fort peu propice (une Voie facile, par conséquent) n’est autre que la Véritable Ecole de la Terre Pure du Bouddhisme ! or, au cœur de l’Europe, ce petit pays est dans la posture d’un modèle. Par sa dimension et le nombre de ses habitants, ce pays est ouvert à une influence spirituelle authentique : universelle ; ce qui n’est actuellement pas le cas de ses grands voisins, saisis d’une inertie intellectuelle proportionnée à leur taille.

Cette votation attire en outre l’attention du monde sur la Suisse au moment le meilleur : alors que le caractère antihumain de ces impératifs provoque chez nos contemporains une lente prise de conscience ayant la nature d’une crise d’identité spirituelle majeure. Il faut être bien aveugle pour ne pas le voir, être très profondément aliéné par les ultimes figures de style d’une propagande politico-médiatique dont la « marque de fabrique » fort peu enviable est la profanation, être crétinisé par les productions parodiques toujours plus grotesques de cercles médiatico- politiques saisis d’anxiété, d’angoisse même, et qui se débattent.

Dans ce contexte, s’il respecte sa dimension spirituelle originelle, l’Islam ne sera plus confiné longtemps dans le rôle du bouc émissaire de notre « société avancée », il y a Islam et Islam, comme il y a Christianisme et Christianisme ! Il y a, parmi bien d’autres témoins, Mohidin ibn arabi, Rabia, au noyau ; un nombre beaucoup plus grand, ai-je entendu dire, à l’écorce. Il y a ce que Saint Bernard de Clervaux et Dante pourraient être pour Jean Delarue et Pierre Dupont, entrés deux fois dans une église au cours de leur vie, lors de l’enterrement de leur père et de leur mère. Le rayon mesurant la distance de la périphérie au centre, le mieux, n’est- ce pas qu’il soit le plus court ? N’est-il pas bien avantageux de le savoir ? Les personnes qui émettent des critiques envers l’Islam et les musulmans en toute inconnaissance de cause